mercredi 2 décembre 2009

Prévisible (Exception n°5)

  Le "Grand emprunt" suscite les convoitises. La commission Rocard-Juppé a rendu son verdict: il faut se concentrer sur l'"économie verte" et la "matière grise". La moitié des 35 milliards d'€ (soit 16 milliards d'€) empruntés sur le dos du contribuable ira à l'université et à la recherche... Les autres tentacules de la pieuvre étatique ministères et  représentants de lobbys s'échauffent déjà. La Culture demande 753 millions d'€ pour numériser le patrimoine historique français (l'heure est à la remise en ordre identitaire: on tente de codifier l'incodifiable, de figer une notion dynamique, à savoir l'identité de la nation, pendant qu'on expose au monde via la numérisation ce qu'un ministère - car le choix sera administratif - a certifié "patrimoine historique français". Triste époque!), le Grand Paris ne doit pas être oublié, les dirigeants de plusieurs fédérations industrielles demandent que le gouvernement attende la tenue des "Etats généraux de l'industrie" (c'est une nouvelle mode, les Etats Généraux), la Santé laisse entendre qu'elle voudrait bien profiter de quelques milliards, et je ne serais pas surpris si les Anciens Combattants demandaient une enveloppe de 2 milliards d'€...
  Bientôt, on s'attaquera dans l'arène politique (voire au sein même du gouvernement) par medium interposé pour obtenir les miettes (copieuses miettes: 19 milliards d'€, rien que ça!) de cet emprunt, en déployant toutes les ruses possibles et imaginables pour persuader l'arbitre que son projet - nécessairement d'avenir - est le meilleur. Lequel arbitre pourra opposer (dans la pratique, dès ce mois-ci) aux élus et courtisans en disgrâce une simple phrase: "ceci ne constitue pas une dépense prioritaire". Clientélisme? Non, en Ve République, il faut parler de rationnalisation, de président au-dessus des partis, de fonctionnement régulier des pouvoirs publics,...

  Comme le titre l'indique, tout ceci était prévisible. C'est ce à quoi il faut s'attendre lorsque l'Etat est obèse, lorsque les hommes et les femmes qui le servent n'ont pour seule préoccupation que de gesticuler afin de rendre "vraisemblable" leur utilité (je suis utile: j'ai pondu X lois, pris telle et telle mesure lors de mon passage au ministère. Donc élisez-moi, ou conservez moi à un poste d'importance), et lorsque les décideurs ont la fâcheuse manie de procéder à une levée d'argent avant de définir son utilisation ou même, plus basiquement, de réfléchir à sa nécessité. Cela me rappelle une phrase attribuée à Reagan (il est vrai qu'elle ne s'appliquait qu'à l'impôt. Qu'importe! Etendons la réflexion à toutes les ressources de l'Etat):
"Le gouvernement ne taxe pas pour obtenir l'argent dont il a besoin, le gouvernement trouve toujours un besoin pour l'argent qu'il reçoit". 

1 commentaire:

Julia Laurent a dit…

Poulet, j'ai toujours pas reçu de lettre et tu me manques.