lundi 12 mai 2008

un nouveau non-débat de plus

J'ai entendu récemment une personne de mon entourage qui critiquait l'augmentation des indemnités du président de la République, suivie de près par un concert de réprobations, du genre "les petits doivent se serrer la ceinture pendant que Sarko s'augmente largement". En effet, le "salaire" mensuel du président de la République a augmenté de 172%, passant de 7 084€ à 19 331€. Une honte pour certains. Une baisse (tout de même, ils ne manquent pas d'air!) pour d'autres. Examinons les faits.

1. La hausse des indemnités du président (qu'il se nomme Sarkozy ou Delanoë, peu importe, car c'est la dotation de la fonction qui est en jeu) s'explique par le rôle nouveau qu'il pourrait être amené à remplir. En effet, la réforme des institutions prévue par le Comité Balladur devrait augmenter les pouvoirs et les responsabilités du président, et donc diminuer d'autant celles du premier ministre. Par conséquent, une hausse des indemnités du président est normale, logique et nécessaire, si elle se conjugue avec une baisse du traitement du premier ministre (avant l'augmentation, ce dernier touchait 240 000€ par an quand le président se contentait de 101 488€). Porter dans un premier temps la rémunération du président à un niveau égal à celle du premier ministre n'a donc rien de choquant.
2. Cette augmentation présidentielle va dans ce que j'appelle le bon sens: celui de la réforme. Ainsi, il fallait mettre un terme à ce système ambigu qui faisait qu'un secrétaire d'Etat était mieux payé que l'hôte de l'Elysée.
3. Même augmenté, le salaire du président de la République reste inférieur à ceux de nombreux autres chefs d'Etat ou de gouvernement.

Ces trois explications ou faits posés, il est possible maintenant d'en venir aux observations et remarques.

A. Le principe de l'augmentation est nécessaire, mais pas suffisant et biaisé dans sa concrétisation. D'une part, il faut poursuivre l'essai en révisant toutes les autres indemnités (notamment celle du premier ministre), et d'autre part, l'augmentation est un peu trop élevée comparée aux besoins... Mais c'est seulement regrettable, pas choquant ou apocalyptique pour les finances publiques

B. S'il on est en droit de contester une telle augmentation (et encore, le traitement final n'est pas excessif) et de préferer un juste milieu à 15 000€ (comme moi), on ne peut que rester perplexe face à l'hypocrisie de certains milieux politiques qui exploitent le ressentiment de Français s'estimant mal payés pour critiquer l'ajustement de l'indemnité présidentielle , qui, au regard de son rôle et de ses responsabilités, n'a rien d'anormal ou d'exhorbitant. Pourquoi ne pas reloger le président de la République dans un HLM, changer sa voiture de fonction pour une R5, le nourrir de Bolino? Il est vrai que les finances publiques et la République toute entière s'en porteront mieux...

C. Réduire le train de vie de l'Etat paraît contradictoire avec cette mesure. C'est oublier que cette réduction ne commence pas par une réduction du salaire du président, qui est loin d'être le meiux payé de France. Cela commence surtout par une remise à plat des rémunérations de la classe politique, en incluant dans le calcul les avantages en nature, logement, frais de bouches, transports (...) des députés, des membres du gouvernement, des eurodéputés,... Et par la réduction du nombre de fonctionnaire, par l'instauration de la rigueur, par la mise en place d'une politique économique de l'offre, par la réduction du déficit. Contrairement à ce que veut laisser penser l'actuel président de la République, une rigueur bien organisée et bien utilisée est féconde. A moins de faire les bonnes réformes.

--> BREF. L'augmentation présidentielle est un non-débat, parce qu'elle n'est pas contradictoire avec la réduction du train de vie de l'Etat, parce qu'elle n'est pas honteuse et parce que un tel débat reste ridicule (poussé à l'excès, cela donne une situation à l'iranienne: juste après la Révolution, il fut de bon ton de s'asseoir à même le sol pour ne pas acheter des chaises, de ne pas venir en voiture au travail, de ne pas s'enduire de fragances bourgeoises...).

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