vendredi 6 février 2009

buy american!


Ou: les hésitations de l'Oncle Sam.

Ces deux mots agitent les économistes depuis quelques jours. De quoi s'agit-il? Pour expliquer, il faut revenir au titanesque plan de relance américain, voté le 28 janvier par la Chambre des Représentants (majoritairement démocrate), d'un montant total de 819 milliards de $.
Ce plan, conçu pour "sauver" plusieurs millions d'emplois (à défaut de les créer) et venir en aide à ceux qui sont touchés par la récession, prévoit notamment 275 milliards de $ destinés aux allègements fiscaux, 10 milliards pour la recherche scientifique, 7,5 milliards pour la rénovation des logements sociaux, 32 milliards pour le réseau électrique (pour l'orienter vers une énergie propre...), 20 milliards sur 10 ans pour développer les "emplois verts" et les éconoomies d'énergies, 20 milliards pour moderniser les écoles, 79 milliards pour aider les Etats à maintenir les emplois d'enseignants, une augmentation des allocations-chômage,...

Bref, une avalanche de chiffres pour mieux faire comprendre à l'Amérique que maman-Etat fédéral s'occupera bien d'elle. Si l'on occulte un peu ces chiffres, on peut trouver une clause, dite "buy american". Ladite clause interdit l'achat de fer ou d'acier étranger pour les projets d'infrastructures financés par le plan de relance (sauf si ces deux matériaux sont en quantités insuffisantes ou si les produits américains augmentent la facture finale de plus de 25%). Les syndicats applaudissent, les libéraux pleurent de dépit facent à ce regain de protectionnisme.

Où est le problème d'une telle clause? 1/les partenaires étrangers (Allemagne et Chine principalement) fortement exportateurs souffrent, et voient leurs économies se dégrader un peu plus. 2/les règles de l'OMC sont clairement violées. 3/les projets d'infrastructures visés sont plus chers, donc l'Etat dépense plus, donc il demandera plus à ses citoyens (soit pour financer directement le projet, soit pour rembourser les emprunts). Qui plus est, une telle clause ne tire pas les conclusions de la crise de 1929, en... empruntant les mêmes méthodes protectionnistes qui avaient conduit à une récession mondiale. La conséquence avait été un relèvement plus lent et plus pénible de l'Amérique.

Face aux inquiétudes des Européens, des Chinois et des Japonais, face au risque de voir le dossier porté devant l'OMC (synonyme: guerre commerciale), face à la grogne des partenaires de l'ALENA, face enfin à la polémique proprement américaine, le président Obama a reconnu que c'était une erreur, et qu'il verrait à quelle formulation les parlementaires pouvaient parvenir. Mercredi, le Sénat a assoupli un peu la règle: un amendement interdit toute entorse aux obligations contractées par les Etats-Unis dans le cadre d'accords internationaux.

Quoiqu'il en soit, ce genre de clause révèle l'inquiétude des Américains pour leur économie, et la tentation grandissante de recourir au protectionnisme (histoire de mettre encore plus de monde au chômage tout en étant approuvé par les syndicats) pour la première économie mondiale. Un tel recours serait catastrophique pour le commerce international, qui pourtant apparaît comme l'une des seules planches de salut pour surmonter la crise, et prouverait la faiblesse d'Obama face aux syndicats américains (au détriment d'une politique économique efficace). Ah... ces démocrates!

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