vendredi 13 mars 2009

De l'"affaire Total"

Total créé la polémique ces derniers temps. En effet, la major mondiale a annoncé des bénéfices importants pour 2008, avant d’officialiser un plan de réorganisation de son activité de raffinage (entraînant la suppression de 555 postes d’ici à 2013 sans licenciements). Période de crise oblige, le personnel politique est sur la brèche, avec des relents anticapitalistes décidément bien répandus, tant à gauche qu’à droite. Selon le leader du NPA, Olivier Besancenot, Total assassinerait purement et simplement l’emploi. Ce serait inadmissible et révoltant. Pour le PCF, en mal de visibilité depuis un an, cette attitude est scandaleuse, Marie-George Buffet proposant d’interdire les licenciements quand il y a versement de dividendes. Le Ps, quant à lui, la « logique financière » doit être dénoncée, tout comme d’ailleurs le double langage du gouvernement qui n’a pris aucune mesure contre licenciements alors que les dividendes sont versés. Selon Martine Aubry, ce serait même de penser que tout est permis. Mme Royal estime quant à elle que l’Etat devrait prélever les bénéfices de Total pour réinjecter ces derniers dans les énergies alternatives (il me semblait personnellement que Total acquittait l’impôt sur les sociétés, et même qu’il versait de l’argent aux Etats étranger au titre de ce même impôt…). A droite, le secrétaire d’Etat à l’Emploi, Laurent Wauquiez, juge lui aussi scandaleuse l’annonce suppression de postes. Il désirerait que le géant pétrolier ait une attitude « exemplaire » en matière d’emploi.

Il faut quand même objecter à tous ces parangons de vertu incitant à la conduite exemplaire de la part de Total quelques petites choses. Premièrement, à ceux qui versent des larmes de crocodiles devant cette soi-disant casse sociale, il n’est pas inopportun de répondre que le plan prévu par l’entreprise ne prévoit aucun licenciement, seulement des départs en retraite ou préretraite choisie, ou bien réaffectation ailleurs. C’est assez exemplaire, comme suppression de poste ; d’autres taillent directement dans l’effectif et licencient. On peut aussi évoquer le fait que les salariés de Total sont plutôt bénéficiaires des bons résultats de leur compagnie, au titre de l’intéressement. Deuxièmement, à ceux qui critiquent les suppressions de poste alors que les dividendes sont versés, il n’est pas inutile de leur rappeler que les actionnaires d’une entreprise ont pris le risque d’y investir leur argent, et donc leur épargne ; on voit mal comment les priver de dividende pourrait revêtir un quelconque aspect de légitimité, et on ne peut comprendre que l’on puisse tirer parti de ce que l’entreprise leur verse ce qui leur est dû pour inciter ladite entreprise à conserver des emplois. Le fait de dire « maintenez les emplois puisque vous faites des bénéfices et que vous versez beaucoup de dividendes » place les actionnaires en situation de profiteurs insensibles aux malheurs des pauvres employés risquant de ne pas être remplacés une fois parti en retraite ; c’est incohérent. Enfin, pour ceux qui réclament une exemplarité en matière d’emplois, il faudrait leur indiquer que le but fondamental d’une entreprise n’est pas de faire travailler, mais de générer des profits. Si l’emploi était la valeur fondamentale, pourquoi ne pas avoir conservé les mines de charbon ? Pourquoi avoir installé dans les usines des machines, plutôt que d’employer des travailleurs pour faire le travail à leur place ? Parce que cela n’a aucun sens économiquement parlant. En l’occurrence, Total procède à un ajustement dans son activité de raffinage. Les Français consomment moins de carburant, les nouvelles motorisations aidant ; pourquoi maintenir une capacité de raffinage égale ? Et donc si on ajuste les capacités de raffinage, on ajuste les emplois. Et, cerise sur le gâteau, sans licenciement. Que demander de plus ?

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